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Il cultive des plantes disparues grâce à des graines retrouvées…à Saint-Pétersbourg !

Trois quarts des variétés de fruits, légumes et céréales cultivés ont disparu en cent ans. Pour faire revivre ce patrimoine introuvable en France, des agronomes sont allés piocher des graines dans l'une des plus anciennes banques de graines mondiales. Explications

Pour retrouver la mémoire végétale, établir une alimentation plus diversifiée et un nouveau modèle économique, des ingénieurs agronomes ont décidé de créer un «jardin connecté» composé de variétés de légumes aujourd'hui introuvables en France. Ce potager d'un nouveau genre est situé sur le site du siège du groupe Seb à Ecully, dans l'agglomération lyonnaise, qui a soutenu financièrement le projet.

Pour pouvoir mener à bien leur projet, les ingénieurs agronomes ont d'abord recensé les plantes locales. «Sur les dizaines de milliers de fruits et légumes locaux identifiés sur les cent dernières années, nous en avons retrouvé 300», indique Stéphane Crozat, directeur du CRBA, le centre de ressources de botanique appliquée, à l'origine du projet. Dans le monde, les trois quarts des variétés de fruits, légumes et céréales cultivés ont disparu en cent ans.

Et pour cultiver des plantes aujourd'hui introuvables en France, les scientifiques se sont rendus à… Saint-Petersbourg! Dans la deuxième ville de Russie, se trouve en effet l'une des plus anciennes banques de graines mondiales. L'Institut Vavilov de Saint-Pétersbourg renferme 325.000 semences, racines, boutures collectées dans le monde depuis 1894. Le botaniste Nicolaï Vavilov (1887-1943) voulait en effet créer une réserve mondiale de plantes, convaincu que la sécurité alimentaire ne serait assurée que si la diversité biologique était préservée. Il a ainsi dédié sa vie à rechercher des variétés sauvages ou cultivées. Cette banque de graines n'est pas unique mais c'est la plus ancienne, la seule à avoir été créé avant la seconde guerre mondiale et l'utilisation des pesticides. Ainsi, «80% des ressources mondiales se trouvent uniquement dans cet institut, souligne Stéphane Crozat.

Des enjeux environnementaux, alimentaires et économiques

«Nous y avons identifié 270 variétés locales de fruits et légumes disparus», souligne Stéphane Crozat. Parmi ces plantes, se trouve le haricot beurre nain des Monts d'or, le chou quintal d'Auvergne ou l'orge gloire du Velay. L'ingénieur agronome qui a travaillé 5 ans pour le CNRS souhaite «que ces variétés locales soient réappropriées par la population, par les particuliers et les jardiniers mais également les agriculteurs. L'enjeu est évidemment environnemental, avec la culture de plantes anciennes, plus résistantes en cas de choc climatique et préexistantes à l'ère des pesticides. Nous souhaitons également préserver la richesse de notre biodiversité et de notre alimentation: il est prouvé que les variétés anciennes sont meilleures pour notre santé. Nous voulons aussi trouver un nouveau modèle économique dans l'agriculture», souligne Stéphane Crozat.

Pour permettre la culture et la réutilisation de ces légumes disparus, le CRBA propose aux volontaires de leurs donner les graines accompagnées d'une formation. En retour, les jardiniers ou agriculteurs s'engagent à redonner la moitié de leurs récoltes une fois les plantes poussées. Une partie de ces végétaux sera congelée pour être préservée en cas de choc climatique, l'autre partie servira à former d'autres agriculteurs à l'utilisation de ces végétaux. Un moyen de permettre aux gens de se réapproprier ces variétés anciennes et d'assurer une diversification du patrimoine botanique. «Nous avons un accord, le matériel ne peut vendu», tient à souligner Stéphane Crozat.

Ainsi, l'ingénieur vise la création de 15 autres potagers de ce type dans d'autres régions de France pour cultiver d'autres variétés locales. A plus long terme, l'objectif serait de protéger l'intégrité des gènes de ces plantes en les inscrivant au patrimoine naturel, au même titre qu'un bien commun, souligne le directeur du centre de ressources de botanique. L'idée est que les pays et les agriculteurs puissent moins dépendre des grands semenciers et assurer leur propre sécurité et autonomie alimentaire.

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